Une marque historique d’AB InBev sacrée bière la plus vendue aux États-Unis. Et alors ?
- François Remy
- 26 sept.
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 29 sept.
Michelob Ultra, une marque de « bière légère supérieure » introduite en 2002 par Anheuser-Busch, occupe la première place des ventes annuelles sur le marché américain. Et ce, tant en grande distribution que dans l’horeca. Au-delà du titre glorificateur, qu'est-ce que cette pole-position nous dit de l'évolution des préférences du consommateur ?

Ce qui vient d’être annoncé : la marque de bière Michelob Ultra a décroché la première place des ventes en canaux de distribution aux États-Unis sur les 52 dernières semaines, a souligné la plateforme experte des données de marché Circana. Une position de leader qui se vérifie aussi sur cette même période dans les bars et les restaurants, a confirmé l’autre firme spécialiste de l’intelligence d’affaires Nielsen.
Pourquoi c'est intéressant en soi : cette consécration commerciale survient plus de deux décennies après le lancement de la marque, qui désormais « se distingue comme leader de croissance dans l’industrie, et elle ne montre aucun signe de ralentissement », commente Scott Scanlon, Executive VP of Category Insights chez Circana. Au cours des cinq dernières années, Michelob Ultra a enregistré une croissance de 15% et gagné plus de 2% de part de marché. Les dernières performances semestrielles d'AB InBev sur ce marché clé des États-Unis doivent beaucoup à Michelob Ultra, qui s’est inscrite en tête du peloton en termes de gains de part de volumes dans le secteur. Une dynamique notable reproduite d’ailleurs au Canada et au Mexique.
Ce qui expliquerait ce momentum : la marque récolterait aujourd'hui les fruits d'une stratégie marketing constante, dixit le directeur commercial de la filiale US d'AB Inbev, un plan de jeu articulé autour d'un positionnement initial clair (légèreté, plaisir et mode de vie actif).
« Depuis plus de vingt ans, Michelob Ultra crée du lien avec ses fans lors des moments qu’ils aiment, en investissant, apprenant et intervenant comme bière officielle des événements sportifs les plus emblématiques des États-Unis », a expliqué Kyle Norrington.
Sponsor officiel de la prochaine Coupe du monde de football, se tenant en partie sur le sol américain, ainsi que des Jeux olympiques de 2028 à Los Angeles, la marque perçoit encore « d’énormes opportunités » qui témoigneront « de la résilience de la catégorie bière aux États-Unis ».

Ce qui se joue globalement : la montée en puissance de Michelob Ultra s’inscrit dans une tendance forte, celle d’une consommation de bière plus modérée, voire orientée bien-être. Avec cette « superior light beer », le géant brassicole n’a pas seulement joué la sélection premium des céréales et vanté les vertus d’un procédé de brassage prolongé. Il a aussi revendiqué une « désaltération responsable » : faibles calories (95), faible teneur en glucides (2,6g), absence d’arômes ou colorants artificiels.
Il convient de reconnaître qu’Anheuser-Busch a visé la prime au pionnier, en jouant la carte d’un produit plus adapté aux choix équilibrés des consommateurs. Une stratégie qui finirait par payer car ces préférences de consommation gagnent désormais en importance. En tout cas, AB InBev, qui a engagé cette année un plan d’investissement de 300 millions $ dans des installations et de la main-d’œuvre américaines, a dévoilé ce 25 septembre un projet de modernisation des équipements dans sa brasserie septantenaire de Los Angeles afin de stimuler une production accrue de… Michelob Ultra.
Ce que vous aviez peut-être manqué : la consommation d’alcool faiblit depuis plusieurs décennies dans les pays les plus développés. Et cette tendance baissière devrait perdurer. Selon de récentes données de New Consumer, les Américains se préoccupent de plus en plus de leur santé et une majorité croissante des personnes sondées se disent prêtes à faire des sacrifices importants, parmi lesquels arrêter complètement de boire de l’alcool.
Jusqu’à présent, cette situation encourageait l’industrie des spiritueux à « principalement se concentrer sur la premiumisation avec des marques clés tout en pariant sur un faible taux d’alcool et sans alcool, par le biais de leurs propres marques ou acquisitions) », analyse DigitalFoodLab. « Seul ce dernier fonctionne raisonnablement bien, mais pas suffisamment pour compenser la diminution des volumes des dernières années. Ce n’est que grâce à des innovations beaucoup plus disruptives que les leaders du marché survivront dans les décennies à venir. »

Ce qu’il faut lire entre les lignes : le cas qui nous occupe reflète la nécessité d’innover autour des marques, idéalement sur le long terme. Le triomphe commercial de Michelob Ultra n'est pas seulement un indicateur de performance produit et de pertinence pour capter la demande moderne, il reflète en quelque sorte une réhabilitation publique pour AB InBev.
Après les turbulences qu'a pu connaître sa marque phare Bud Light depuis 2023, sanctionnée par le public pour un marketing jugé déplacé et ainsi détrônée après des décennies de règne sur les ventes, voir une autre de ses marques historiques s'emparer de la première place démontre l'efficacité de son portefeuille diversifié (500+).
Avec un marketing moins perceptible chez nous que d’autres étiquettes d’AB InBev, Michelob Ultra semble avoir construit sa domination naissante au travers d’une innovation discrète et progressive. À noter à ce propos que sa version sans alcool, la Michelob Ultra Zero, s’est déjà imposée comme l’une des références du segment en seulement neuf mois.
Lors de la présentation de ses résultats périodiques fin juillet, le géant brassicole se félicitait d’occuper la place du leader des bières sans alcool sur le marché américain.
« Notre portefeuille affiche une hausse des volumes dans le haut de la fourchette entre 20% et 30%, et nous sommes en tête du secteur en termes d’innovation, Michelob Ultra Zero et Busch Light Apple étant à ce jour les deux meilleures nouveautés réalisées cette année dans le secteur ».